Dès le début du XXe siècle, les hôpitaux font partie des nombreux programmes architecturaux qui ont été transformés par la lumière électrique. Les blocs opératoires, les cabinets d'auscultation, les espaces de service, mais aussi les dortoirs ont connu de grands changements avec l'introduction d'une lumière plus performante mais parfois source de nouvelles nuisances difficilement négligeables.
A partir de l'étude d'un corpus de revues d'éclairage américaines, britanniques et françaises mais aussi de revues médicales comme Techniques Hospitalières et de catalogues d'entreprises, sans oublier de mentionner les quelques ouvrages de référence consacrés à la question, cette contribution propose de raconter l'histoire de la maîtrise des sources lumineuses dans les chambres d'hôpitaux, en soulignant comment la lumière brute a été progressivement domptée par toute une série d'appareils chargés d'exalter ses vertus fonctionnelles tout en contribuant au bien-être du patient.
Directe, indirecte, canalisée par des réflecteurs mobiles ou bien diffusée selon la volonté du malade alité, la lumière artificielle interagit avec l'architecture pour façonner l'environnement d'hommes et de femmes plus vulnérables qu'en temps normal. L'histoire de l'adaptation des sources lumineuses à ce milieu très particulier révèle également comment s'affrontent, au-delà de la réalité des phénomènes physiques, des positions idéologiques qui traverseront tout le XXe siècle.
Placé au centre d'un dispositif chargé d'améliorer son confort sans être directement impliqué dans ce processus de conception, le patient n'apparaît en effet que d'une manière très abstraite. Réduit à un œil exposé aux rayons lumineux, modélisé parfois par quelques figurines introduites dans des maquettes au dixième ou bien remplacé par des cobayes chargés au mieux de tester des solutions de laboratoires, le patient reste au second plan, à l'écart de débats techniques trop souvent cantonnés dans les revues spécialisées.