L'officier de marine Edmond Pâris (1806-1893) a œuvré pour faire du bateau un monument à conserver et de la construction navale un objet d'histoire. À la différence d'Augustin Jal qui ambitionne de reconstituer l'histoire du vaisseau à partir de sources écrites ou de représentations artistiques (Archéologie navale, 1840), Pâris s'attache à documenter la construction navale du XIXe siècle en collectant les plans, en conservant des échantillons et en analysant les processus de construction et les techniques de navigation. Acteur de la révolution maritime qui voit les flottes de guerre et de commerce passer de la voile à la vapeur et du bois au fer, il s'intéresse autant à la machine à vapeur qu'à la construction navale vernaculaire qui, en Europe et au-delà, tend à disparaître. Loin de se limiter au seul aspect architectural, il considère le navire comme un système technique (dans le sens proposé par B. Gille) et mène une réflexion sur l'articulation entre forme et usage et entre construction navale et espace maritime. Lorsqu'il prend la direction du musée de Marine du Louvre, Pâris entreprend de rassembler et de publier des sources dont il espère que les « savants », en particulier les historiens, se saisiront pour écrire une histoire de la construction navale dont il propose une ébauche. L'histoire navale ne saurait selon lui, comme selon Jal, se faire sans une histoire du navire qui nécessite une parfaite connaissance de l'objet technique et de ses différentes expressions. L'œuvre de Pâris est aujourd'hui reconnue dans les domaines de l'ethnographie nautique et de l'archéologie navale en tant que corpus mais aussi pour son apport méthodologique ; elle est également reconnue mais peu exploitée par les historiens. Présenter ce volet des travaux d'Edmond Pâris peut donc s'apparenter à proposer une réflexion épistémologique sur l'histoire de la construction navale.