A la fin du 18e siècle, les trottoirs sont (ré)introduits dans nombre de villes européennes, sur le modèle de ceux de Londres. Au siècle suivant, leur aménagement se généralise ; le trottoir s'affirme désormais comme un élément constitutif du paysage urbain. Les matériaux, les gabarits (largeur, hauteur, inclinaison), les éléments servant à les délimiter (bornes, chaînes, etc.) font l'objet de nombreuses expérimentations et témoignent de la circulation des savoirs en matière de voirie au 19e siècle. Les diverses formules visent à offrir confort et performances aux piétons, mais aussi aux véhicules qui doivent traverser cet espace à l'emplacement des portes cochères. La construction des trottoirs doit répondre aux nombreuses fonctions dévolues à cet espace au 19e siècle : circulatoire (pour les piétons), mais aussi résidentielle (espace de transition entre les façades et la chaussée), sanitaire (protéger des eaux d'écoulement), sociale (lieu de sociabilité), commerciale (lieu de la pratique du lèche-vitrine et du placement de terrasses de café), esthétique (souligner les lignes de perspective par la bordure et participer au chromatisme de la rue) et sémiotique (renforcer la hiérarchie de artères). Les réflexions sur les trottoirs s'élargissent à l'ensemble de la voirie quand il s'agit de concevoir l'articulation avec la chaussée, et notamment sa traversée (avec les premiers passages-piétons). Les trottoirs doivent également être analysés plus largement dans le contexte en matière de matériaux et de typologies pour les espaces piétonniers : de la contre-allée aux passages couverts. C'est à partir du cas bruxellois, richement documenté et témoignant de la circulation des savoirs entre Londres, Paris et Bruxelles, que nous étudierons l'histoire de la construction et des usages de cet élément constitutif du paysage urbain du long 19e siècle (1770-1920).