En vallée mosane, dans la région comprise entre Dinant et Maastricht, les XVe et XVIe siècles sont marqués par une intense activité constructive, touchant aussi bien la poursuite de grands chantiers que la reconstruction d'édifices plus modestes, en particulier en milieu rural. Les recherches menées sur les marques lapidaires et celles poursuivies sur le décor sculpté des sites mosans mettent en évidence plusieurs modifications dans les méthodes de façonnage et de mise en œuvre des calcaires de Meuse à cette époque. En effet, les trous de pince, absents jusqu'alors du paysage régional, apparaissent et se généralisent sur les maçonneries ainsi que sur l'ornement. Les signes identitaires et utilitaires, employés avec parcimonie aux siècles précédents, prennent leur essor sur des édifices situés aussi bien à proximité des carrières qu'au sein d'aires géographiques plus éloignées. Ces phénomènes, qui soulèvent des questionnements liés à l'organisation et à l'approvisionnement des chantiers, côtoient d'autres mutations importantes. D'une part, la systématisation du ciseau et de la pointe produisant des sillons linéaires obliques supplée à la taille dite « punctiforme » employée depuis le XIIIe siècle. D'autre part, les modèles ornementaux, principalement constitués de feuillages, tendent à se simplifier, parfois jusqu'à l'abstraction. Ces bouleversements peuvent être interprétés comme une volonté d'optimiser les techniques et les savoir-faire, dans une perspective d'économie de temps et de moyens visant à satisfaire la demande croissante des chantiers en matériaux de construction. Ce regard croisé offre un nouvel éclairage sur l'art de bâtir en vallée mosane à la charnière des époques médiévale et moderne.
- Autre